Retour et analyse sur les récentes attaques IED

Je vous relate aujourd'hui un article très intéressant découvert sur https://nct-cbnw.com/ied-threats-an-update/

by Andy Oppenheimer

Alors que les attaques utilisant des IED ont diminué ces dernières années, ces engins restent cependant une arme de choix utilisés par la mouvance djihadiste, les organisations politiques ou revendicatives criminelles et autres "loups solitaires". Le combat en zone urbaine des armées régulières, souvent en manque de munitions conventionnelles, l'emploi de drones commerciaux et l'utilisation des imprimantes 3D ont aussi révolutionné l'emploi des IED.

Le 31 janvier 2023, une bombe explose en plein cœur d'une mosquée située à proximité du siège de la police locale et d'une division antiterroriste à Peshawar au nord-ouest du Pakistan tuant plus de 50 personnes. Déclenché par un "suicide bomber" ayant réussi à franchir les contrôles et à se placer au premier rang dans la salle de prière, l'engin de 12 kg à soufflé le bâtiment accueillant principalement pour la prière, les policiers des bureaux environnants. Cette attaque meurtrière a été revendiqué par le groupe taliban TTP (the Tehreek-e-Taliban) en réponse à la mort d'un de leur chef. Le 1er mai 2010 ce groupe était déjà responsable d'un attentat raté au véhicule piégé en plein cœur de Time Square à New York.

Des milliers de mines enfouies dans le sol et autant d'engins explosifs improvisés parmi les décombres, tel est l'héritage mortel que laissera aux habitants le conflit Russo-Ukrainien. Engins explosifs ressemblant à des jouets pour enfants, piègeages des bâtiments, les deux belligérants rivalisent d'ingéniosité pour entraver les mouvements des troupes ennemies. Reproduisant de bons vieux classiques ayant déjà fait leurs preuves, les engins explosifs improvisés tels que Roadside Bomb ou autre Pressure Plate sont similaires à ceux conçus par Al-Qaïda et l'état islamique au Moyen-Orient. Il est déjà certain que plusieurs décennies devront être mises à profit pour nettoyer le sol Ukrainien à l'issue du conflit.

L'enquête publique officielle menée en 2023 sur l'attentat à la bombe perpétré au sein du Manchester Arena a rappelé de manière brutale les effets terribles d'un attentat-suicide commis à l'aide d'un engin explosif improvisé. Le 22 mai 2017 le terroriste djihadiste Salman Abedi tue 22 personnes et en blesse des centaines d'autres lors d'un concert, lorsqu'il fait exploser un engin explosif au TATP dissimulé dans un sac à dos. Son engin était valorisé en terme de fragmentation par une multitude d'écrous et de boulons. À la suite de cet attentat, de multiples questions se sont posées pour savoir si Abedi avait agi seul pour acheter les composants et préparer l'attentat. Les investigations ultérieures, mises en lumière lors de l'enquête publique, ont révélé qu'Abedi avait travaillé avec son frère. Dans les attentats actuels, la notion de "loup solitaire" fait souvent polémique, car on se rend compte que dans la plupart des cas, des complices gravitent autour de l'auteur principal. En effet, la planification, la préparation, la confection et l'exécution d'un attentat requièrent bien souvent de multiples compétences et l'appui d'un réseau.

Dans le cas précis de l'attentat de Manchester, la sophistication de la construction a été mise en évidence par la présence d'une batterie de 12 volts utilisée comme source d'alimentation ( plus puissante que celle que l'on trouve habituellement dans de nombreux IED terroristes) et le détonateur semble avoir été couplé à un petit circuit imprimé soudé à l'intérieur de l'une de ses extrémités ayant pu servir de declencheur secondaire afin de s'assurer que l'IED explose au cas où le poseur de bombe reculerait ou serait mis hors d'état de nuire.

Explosif artisanal de prédilection de cette dernière décennie, le TATP a aussi été utilisé dans les quatre attentats du 7 juillet 2005 contre le réseau de transport londonien. Fabriqué à partir de matériaux disponibles à l'achat pour le grand public, le TATP est 80 % plus puissant que la TNT et reste difficile à détecter. Très instable, il peut cependant exploser prématurément, ce qui a conduit les artificiers terroristes à se tourner vers de nouveaux explosifs artisanaux ces dernières années.

Les IED transportés ou incorporés dans des véhicules contiennent traditionnellement du nitrate d'ammonium (AN). Al-Qaïda et l'État Islamique ont largement utilisé cet explosif après que l'IRA ait lancé la tendance plusieurs années plus tôt. Fabriqués à partir d'engrais agricoles, cet explosif est la signature de groupes terroristes comme les talibans qui continuent à utiliser d'importants stocks provenant de frontières peu sûres et en proie à des conflits.

Le 14 novembre 2021, un demandeur d'asile irakien meurt et blesse un chauffeur de taxi au moment où il fait exploser son IED, à l'extérieur de l'hôpital de Liverpool. Celui-ci transportait, en tant que passager du taxi, un engin de confection simple lequel a explosé prématurément. Sur les caméras de vidéosurveillance on remarque qu'une fumée blanche brillante s'échappe de l'arrière du taxi au moment de l'explosion, semblant indiquer que l'explosif utilisé pouvait être de la poudre flash provenant de fusées d'artifices. Cet incident isolé semble démontrer la baisse d'utilisation d'IED sophistiqués mais aussi pointe du doigt la fine frontière entre l'echec du poseur de bombe et le succès meurtrier.

En janvier dernier également, un djihadiste présumé a été jugé en Angleterre pour avoir placé une cocotte-minute de 13 kg remplie de poudre à canon à l'extérieur de l'hôpital St. James à Leeds. Celui-ci aurait également planifié de cibler une base de la RAF. La cocotte-minute fait écho au mode opératoire des deux attentats à l'explosif commis par les frères Tsarnaev lors du marathon de Boston en avril 2015. Il va sans dire que les terroristes apprennent les uns des autres.

Le nombre d'extrémistes d'extrême droite a considérablement augmenté en Europe, aux États-Unis et dans d'autres pays au cours de la dernière décennie. Au cours de l'insurrection d'extrême droite qui a ravagé le Capitole à Washington le 6 janvier 2021, deux bombes artisanales, de type pipe-bomb, ont été trouvées près des sièges du Comité national républicain et du Comité national démocrate. Un suspect est apparu sur la vidéo des caméras de police, mais à ce jour, personne n'a été appréhendé.

La menace de l'extrême droite n'est pas nouvelle. Le pire attentat terroriste commis aux États-Unis l'a été par un membre d'une milice d'extrême droite, Timothy McVeigh, qui, le 19 avril 1995, avec l'aide un complice, a placé un engin explosif de 1 100 kg au sous-sol d'un bâtiment fédéral à Oklahoma City, tuant 168 personnes, en blessant 680 autres et détruisant une grande partie du centre ville.

Depuis 2022, on remarque sur le territoire national l'explosion des groupes extrémistes, se radicalisant de manière préoccupante (environnementalistes, ultra gauche, ultra droite...) épousant diverses formes d'extrémisme, de haine et de violence. Reste à voir si ces groupes et individus instables adoptent l'engin explosif improvisé comme mode opératoire.

À la lumière de tous ces exemples et modes opératoires différents, comptons et encourageons nos différents services de renseignements et de sécurité pour identifier, surveiller, anticiper et contrer toute éventuelle tentative.