Une récente étude des chercheurs de la School of Science de l'Université de l'Indiana a démontré que les mouches les plus communes dites "mouches à viande" pouvaient être utilisées comme de véritables capteurs chimiques, spécialisées dans la détection d'agents toxiques de guerre.
Présentes sur la quasi-totalité du globe et se révélant très habiles pour échantillonner l'environnement qui nous entoure, ces petites bêtes volantes ont la particularité de goûter sans discontinuer tout liquide ou matière à leur portée et ainsi stocker dans leur intestin de précieuses informations sur la nature des produits ingérés.
L'équipe des professeurs Picard et Manicke de l'école des sciences de l'IUPUI a pu mettre à profit ces particularités pour étudier leur capacité de détection d'agents chimiques de guerre.
Appâtées et piégées sur plusieurs kilomètres de distance après avoir été exposées à des simulants d'agents de guerre chimiques, trois espèces de mouches ont été étudiées afin de déterminer la persistance de ces composés dans des conditions environnementales variables.
"Nous avons utilisé un spectromètre de masse pour déterminer les produits chimiques présents dans les intestins des mouches à viande", explique M. Manicke. "Nous avons pu détecter les simulants d'agents de guerre chimique, ainsi que certains éléments en lesquels les agents chimiques se décomposent une fois qu'ils sont dans l'environnement. Si une mouche rencontre une source d'eau dans laquelle un agent chimique est hydrolysé, nous le retrouvons immanquablement dans la mouche".
Bien que les agents de guerre chimique ne persistent pas longtemps dans l'environnement, les chercheurs ont constaté qu'ils étaient suffisamment bien conservés dans les intestins de la mouche pour permettre une analyse chimique. Ils ont ainsi pu détecter les simulants d'agents de guerre chimique jusqu'à 14 jours après l'exposition initiale de la mouche.
Cette étude démontre ainsi qu'une alternative plus sûre pour la collecte d'échantillons est possible, notamment dans des zones parfois éloignées ou difficiles d'accès, en raison de conflit ou de contamination supposée, sans risque pour la vie humaine.
Cette étude fait écho à d'autres travaux effectués il y a quelques années par l'armée américaine sur la capacité des sauterelles à détecter et différencier des substances explosives.
Le Professeur Barani Raman et ses collègues de l’Université de Washington se sont ainsi inspirés des sens olfactifs de la sauterelle américaine, Schistocerca americana, pour créer des « renifleurs » de bombes.
Pour tester cette capacité, l’équipe a projeté des vapeurs de différents matériaux explosifs sur des antennes de sauterelles, y compris des vapeurs de trinitrotoluène (TNT) et de son précurseur, le 2,4-dinitrotoluène (DNT).
En implantant des électrodes dans les lobes antennaires des sauterelles, les chercheurs ont découvert que différents groupes de neurones étaient activés lors de l’exposition aux explosifs. Ils ont analysé les signaux électriques et ont pu distinguer les vapeurs explosives des produits non explosifs.
Visiblement jamais à court d'idées, les chercheurs ont alors placé ces charmantes sauterelles sur une plate-forme à roues télécommandées pour tester leur capacité à détecter des explosifs à différents endroits. Les insectes ont réussi à détecter où se trouvait la plus forte concentration d’explosifs lorsque l’équipe a déplacé la plate-forme sur différents sites.
La science ne finira jamais de nous étonner !
Sources:
Les insectes comme capteurs chimiques : Detection of Chemical Warfare Agent Simulants and Hydrolysis Products in the Blow Fly Using LC- MS/MS (Détection de simulants d'agents de guerre chimique et de produits d'hydrolyse dans la mouche à viande par LC- MS/MS). Environmental Science and Technology, 21 septembre 2022. (abonnement requis)
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